Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/256

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il acheta une maison à Vaugirard, près Paris. Lorsqu’il mourut, l’ambassadeur, M. le prince de Masserano, s’empara de tous ses papiers. Vous avez dû les recevoir par l’intermédiaire de l’ambassadeur d’Espagne et avec eux le contrat d’acquisition de ladite maison.

« Mon père avait payé en partie cette propriété ; si on l’avait laissée à ma mère, cela l’aurait aidée à nous élever, mon frère et moi ; mais, dix mois après la mort de mon père, le domaine s’en empara comme bien appartenant à un Espagnol, à cause de la guerre qui existait alors entre les deux pays. Depuis, elle a été vendue et le domaine a entre les mains l’excédant des 10,000 francs qui restait dû sur le prix d’acquisition : toutefois ma mère paya 554 francs de droit de mutation au nom des héritiers, dont elle n’a jamais été remboursée.

« Vous devez sentir, Monsieur, combien ma pauvre mère a eu à souffrir, restant sans fortune et chargée de deux enfants : mon frère a vécu dix années. Eh bien ! malgré l’état de détresse où elle se trouvait, elle n’a pas voulu que la mémoire de celui qui avait été l’objet de ses plus tendres affections restât entachée. À cause de la guerre, mon père ne recevait rien depuis vingt mois et, par conséquent, était très gêné ; à la sollicitation de ma mère, ma grand’mère prêta à mon père 2,800 francs, sans lui demander de reconnaissance de cette somme, ce qui fit qu’à sa mort elle se trouva sans titre. Ma mère en a payé exactement les intérêts à ma grand’mère, qui en avait besoin pour vivre ; à la mort de celle-ci, elle remboursa le tiers de la somme à sa sœur et l’autre tiers à son frère.

« Je ne désire pas, monsieur, que l’aperçu des malheurs dont je vous ai bien faiblement esquissé les traits