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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/55

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la même carrière et y appropria son éducation. Après les évènements de 1815, M. Chabrié abandonna la marine de l’État, pour courir les chances hasardeuses de la marine commerciale. J’ignore les motifs qui le déterminèrent dans cette circonstance.

M. Chabrié est entièrement en dehors de la ligne des capitaines de la marine marchande, braves marins qui, d’ordinaire, ont commencé par être simples matelots, puis se sont avancés par leur intelligence et leur bonne conduite. M. Chabrié a beaucoup d’esprit naturel, la repartie toujours prête, des saillies étonnantes de naïveté et d’originalité : sa brusquerie ressort autant de sa franchise que des habitudes de son état ; mais ce qu’il y a de plus remarquable en lui, c’est l’extrême bonté de son cœur et l’exaltation de son imagination. Quant à son caractère, c’est bien le plus affreux caractère que j’aie jamais rencontré : sa susceptibilité, qu’irritent les plus petites choses, est intolérable ; bourru et colère, ce serait en vain que, dans ses accès de mauvaise humeur, on rechercherait en lui des traces de la bonté de son cœur. Il ne ménage rien, blesse ses amis de l’ironie la plus amère, se plaît à les torturer sans la moindre