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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/63

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description nouvelle. Je dirai seulement que le mal de mer est une souffrance qui ne ressemble en rien à nos maladies habituelles : c’est une agonie permanente, une suspension de vie ; il a l’affreux pouvoir d’ôter, aux malheureux qui y sont en proie, l’usage de leurs facultés intellectuelles, et aussi l’usage de leurs sens. Les personnes d’une organisation nerveuse éprouvent les cruels effets de ce mal avec plus d’intensité que les autres. Quant à moi, je le ressentis avec une telle constance, qu’il ne se passa pas un seul jour, durant les cent trente-trois du voyage, sans que je n’eusse des vomissements.

Notre bâtiment était mouillé au bas de la rivière : le temps ne semblait pas devoir favoriser notre sortie du périlleux golfe de Gascogne ; néanmoins le capitaine, vers trois heures, fit lever l’ancre. La pesante machine, légère comme une plume au milieu des flots, se mit en marche à travers l’immensité qu’embrasse le ciel, et docile au génie de l’homme, allait dans la direction qu’il lui donnait.

À peine étions-nous dans le golfe, que le sifflement aigu des vents, le tumulte des vagues nous annoncèrent la tempête. Elle se déclara bientôt après dans toute sa violence par d’ef-