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Pour prendre une apparence guerrière, le général Nieto avait formé un camp ; il croyait habituer ses soldats aux fatigues en leur faisant quitter leurs casernes. Ce camp, très mal placé sous le rapport militaire, était à une lieue d’Aréquipa, et se trouvant auprès d’un village, il avait le grave inconvénient d’être entouré de chicherias (sorte de cabarets où l’on vend la chicha, boisson enivrante faite avec du maïs concassé[1], mis en fermentation). Le quartier général était dans la maison d’un señor Menao. Althaus avait essayé de détourner Nieto de l’établissement de ce camp, en lui faisant observer les dangers que, dans la saison des pluies, y courrait la santé du soldat, et les dépenses énormes qui en résulteraient ; le présomptueux général avait dédaigné ces considérations, ainsi que les sages avis de son chef d’état-major, relativement à l’emplacement où il convenait de camper : Nieto s’imaginait faire de l’effet, paraître un grand capitaine par cette image de la guerre ; il cédait aussi à la sotte vanité d’étaler son pouvoir au milieu des tentes et

  1. Là où il n’y a pas de moulin, les femmes mâchent le maïs et le crachent à mesure dans le vase où elles le font fermenter.