appuyée sur des coussins de soie. Les trois religieuses, tout à fait élégantes avec leur robe à larges plis, prirent place autour de moi ; Rosita, assise sur un carreau, les jambes croisées à la mode du pays, se penchait sur le pied du divan ; la bonne Manuelita, assise à côté de moi, jouait avec mes cheveux, qu’elle dénattait et renattait de mille manières ; et la grave Margarita, au milieu de nous, montrait avec complaisance sa belle main grasse et blanche qui courait sur son gros rosaire d’ébène. Ma cousine, l’actrice principale, était assise, en face de son auditoire, sur un grand fauteuil bien à l’antique et avec un bon carreau sous ses pieds.
Ma cousine commença par nous faire connaître les motifs qui avaient déterminé Dominga à se faire religieuse. Dominga était plus belle qu’aucune de ses trois sœurs : à quatorze ans, sa beauté était déjà assez développée pour qu’elle inspirât de l’amour. Elle plut à un jeune médecin espagnol qui, apprenant qu’elle était riche, chercha à s’en faire aimer : ce lui fut chose facile ; Dominga naissait au monde ; elle était tendre et elle l’aima comme on aime à son âge, avec sincérité et sans défiance, croyant, dans sa naïveté,