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costume parisien, la femme séduisante qu’on a rencontrée le matin dans l’église de Sainte-Marie. Aussi, à Lima, tous les étrangers vont-ils à l’église, non pour entendre chanter aux moines l’office divin, mais pour admirer, sous leur costume national, ces femmes d’une nature à part. Tout en elles est, en effet, plein de séduction : leurs poses sont aussi ravissantes que leur démarche ; et, lorsqu’elles sont à genoux, elles penchent la tête avec malice, laissent voir leurs jolis bras couverts de bracelets, leurs petites mains, dont les doigts, resplendissant de bagues, courent sur un gros rosaire avec une agilité voluptueuse, tandis que leurs regards furtifs portent l’ivresse jusqu’à l’extase.

Un grand nombre d’étrangers m’ont raconté l’effet magique qu’avait produit, sur l’imagination de plusieurs d’entre eux, la vue de ces femmes ; une ambition aventureuse leur avait fait affronter mille périls dans la ferme persuasion que la fortune les attendait sur ces lointains rivages. Les Liméniennes leur en paraissaient être les prêtresses, ou plutôt, réalisant le paradis de Mahomet, ils croyaient que, pour les dédommager des pénibles souffrances d’une longue traversée et récompenser leur