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RICHE OU AIMÉE ?

— Et vous en connaissez le moyen ?

— Oui, fit André avec une superbe confiance. Lorsque j’ai su, à la mort de mon père, la piètre situation que ses revers m’avaient faite, je ne m’y suis pas résigné, je l’ai acceptée avec soumission, mais comme passagère, et, tout de suite, j’ai songé à la manière d’en sortir ou de l’améliorer. J’étais sous-lieutenant, alors, il est bien connu qu’on ne s’enrichit pas dans l’armée ; un instant, j’ai eu la censée de la quitter pour prendre une position plus lucrative. Mais laquelle ? Outre que j’aime beaucoup mon métier, je ne vis pas clairement alors à quel autre je serais apte. Mes études, dirigées vers un but spécial, ne me permettaient guère d’en viser un nouveau, surtout à l’âge que j’avais. Qu’aurais-je pu faire d’avantageux sans le payer par de longues années de surnumérariat réel ou effectif, par la modicité des émoluments, et aussi par l’incertitude du succès final ? Cet aléa me décida à rester au régiment et à y travailler de façon à assurer mon avancement, et même à le presser. Cela, c’était déjà un atout dans mon jeu, mais ce n’était que le sept ou le huit ; heureusement, j’en possède un plus gros.

— L’as ? fit la douairière, riant.

— Peut-être.

— Puis-je savoir lequel ?

— Parfaitement. Oh ! je ne le cache pas, un mariage riche.

— Eh ! eh ! l’idée n’est déjà pas si mauvaise ; moderne à coup sûr, mais il faut être de son temps.

— N’est-ce pas, ma tante ? Aussi bien, voilà le raisonnement que je me suis loyalement tenu. Chacun, en ce bas monde, a son lot d’avantages et de désavantages, j’appelle cela l’actif et le passif. Voyons mon actif : j’ai vingt-huit ans, une santé de fer, un très vieux et très beau nom dont nulle tache n’a jamais terni le blason ; je suis très noblement apparenté, mes relations d’amitié aussi bien que de famille, sont aussi bonnes que brillantes, et une femme ne peut manquer d’en être flattée et charmée ; j’ai un métier dont le prestige, en ces temps troublés, va grandissant ;