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RICHE OU AIMÉE ?

II

Le temps ne semblait vraiment pas long à André de Chateaublon. Il avait d’abord un de ces heureux caractères, toujours joyeux, qui se plaisent partout, s’accommodent de tout ; de plus, il aimait à la fois la campagne et le confort et, à Bloicy, il était, sous ce rapport, servi à souhait. Enfin, s’il n’avait pour toute compagnie que celle d’une vieille femme, comme la douairière s’intitulait elle-même, non sans coquetterie, c’était celle d’une personne dont l’esprit charmant avait su la sauver de la décadence de l’âge et la laisser encore, sinon séduisante, du moins si agréable que bien des hommes préféraient sa conversation à celle de femmes plus jeunes.

Mme de Vauteur avait environ soixante ans ; veuve du frère aîné de la mère d’André, sa fille unique, Jeanne de Vauteur, mariée depuis quinze ans au richissime comte d’Azas, l’avait rendue grand’mère de deux gentils enfants. Elle partageait sa vie entre sa terre de Bloicy, où elle passait l’été, et Paris, où, contre tout usage, elle rentrait de fort bonne heure. Elle vivait un peu à l’écart du grand tourbillon où était entraînée sa fille, mondaine à outrance et, l’ayant été avant elle, quoique avec moins d’acharnement, elle semblait avoir pris sa retraite. Mais, malgré les apparences, elle s’était conservé un noyau de relations très compact, — d’autant plus charmant qu’il était plus choisi, — qui, à Paris, l’entourait beaucoup, et, lorsqu’elle était dans ses terres, n’attendait qu’un signe pour venir la rejoindre. Car, non seulement elle était aimable et plaisait à tout le monde, mais elle avait le secret de rendre son hospitalité charmante.

C’était, en même temps qu’une femme très distinguée, une femme très pratique. Sa maison était supérieurement ordonnée, ce qui lui permettait de la tenir sur un pied en apparence au-dessus de sa