Page:Floran - Riche ou aimée, 1920.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
32
RICHE OU AIMÉE ?

que sa situation pécuniaire ne venait pas excuser l’obscurité de son extraction. Si elle eût apporté à son mari quelques centaines de mille francs, on ne se fût pas inquiété de sa naissance. Pauvre, on considéra que, l’épousant, Léopold de Lacourselle avait fait une mésalliance.

Cela fut très dur à sa femme ; elle n’en dit rien, pourtant, cacha ses révoltes et son dépit secret, l’orgueil lui était venu de ne pas s’avouer humiliée. Elle se refusa à comprendre les allusions plus ou moins blessantes, les impolitesses peu ou pas déguisées qui, les premiers temps de son mariage, ne lui furent pas ménagées. Ainsi, elle en atténuait la portée aux yeux du monde et à ceux de son mari, ce qui était déjà une grande adresse. Le comble en fut sa bienveillance voulue, et extrême ; son amabilité immuable, son humeur invariablement sereine. Elle désarma, de la sorte, les gens les moins bien disposés à son égard, s’attacha ceux qu’aucune prévention n’indisposait contre elle et parvint, peu à peu, à se faire accepter de toutes les relations de famille et d’amitié de son mari, et même sincèrement aimer de quelques-unes.

Mais elle n’en était pas arrivée là sans bien des combats intimes, des souffrances ignorées d’amour-propre, de longues difficultés, patiemment vaincues. Elle avait connu, aussi, des heures pénibles, d’angoissants soucis d’argent, des situations compliquées, inextricables ; elle voulait épargner tout cela à sa fille. Gisèle possédait la beauté, la position sociale, il ne lui manquait que la fortune. Sa mère n’avait trouvé, pour la lui apporter, qu’un riche mariage et l’y préparait de son mieux, cherchant, d’avance, à la prémunir contre tout entraînement du cœur, comme celui auquel elle avait cédé, ne rendant pas justice à la somme de bonheur qu’elle lui avait due t qui était, peut-être en ce monde où rien n’est complet, tout ce qu’il est permis d’attendre des joies de la vie.