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RICHE OU AIMÉE ?

finesses et les expansions charmantes des amitiés de femme. C’était, pour André, une impression neuve et exquise de pénétrer cette âme chaste de jeune fille. Il avait justement conscience d’y lire à livre ouvert ; très subtil quant aux impressions, il les sentait plus qu’il ne les raisonnait, et c’est ainsi qu’il jugeait, en toute vérité, que Gisèle agissait envers lui avec autant de simplicité et de détachement qu’il faisait à son endroit. Elle, non plus, ix cherchait pas à le subjuguer ni à se l’attacher, elle avait trouvé une agréable amitié, venant derrière une sympathie de premier abord, et elle avait tendu la main vers elle, heureuse d’une intimité dont étaient bannies les éternelles rivalités féminines, les secrètes jalousies, engendrant d’un côté la malveillance bien cachée, de l’autre la défiance non dissimulée, et elle s’abandonnait à son charme en toute sécurité.

Lorsque André arriva a Paris, ses premiers moments furent pour son installation, aussi bien au régiment que dans son modeste appartement de garçon, mais cela ne demanda que quelques jours. Les nombreuses distractions que la capitale, même en cette saison d’été, offre à tout homme jeune et aimant le plaisir, vinrent au-devant de lui, mais il ne répondit pas à leur appel : sous sa frivolité, ce n’était pas un puritain, mais c’était un sage. Dans les heures inévitables de désemparement qui suivent toujours un changement de vie, d’habitudes ou de lieux, il se surprit, un jour, à passer rue de Fleurus pour voir, de loin, l’appartement que Gisèle habitait. Il le reconnut aisément, au quatrième d’une grande maison qu’elle lui avait indiquée. Les fenêtres en étaient closes ; cela ne lui causa aucun étonnement, mais éveilla en lui un léger regret. Lorsqu’elles seraient rouvertes, avec quel grand plaisir il viendrait, dans cet intérieur qui, avec Gisèle, ne pouvait manquer d’être charmant, passer ces soirées dont il ne savait que taire ; n’aimant pas le café guère le cercle, les théâtres étant fermés, et, du reste, inaccessibles d’une façon suivie à sa bourse toujours un peu plate. Insensiblement, il prit le parti, après son dîner, d’aller presque chaque soir jusqu’au Luxembourg