Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/141

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s’éveille. Cette autorité et cette liberté, on les trouve, dès le début de cette histoire de la peinture, dans l’œuvre du grand Wou Tao-tseu (en japonais, Go Dô-si). Nous les retrouvons, identiques et non altérées par les siècles, chez le vieillard fou de dessin, Hokousaï.

Mais un autre courant de pensée allait s’imposer pour un temps à la peinture, avec la diffusion de la philosophie Thyen-thaï. Sortie de l’ésotérisme indien, prêchant le développement extatique des vertus spirituelles, elle ne doit pas être interprétée comme une déviation stérile, comme un dangereux délire, mais elle était moins favorable que le Zénisme au développement d’un art vivant. Au Çakya-Mouni barbu de Wou Tao-tseu (Pl. XVII), si puissamment humain et sincère, et qui semble le véridique portrait de quelque moine des solitudes, à la Kwannon du même maître, qui descend des hauteurs éternelles avec la souveraine grâce d’une reine céleste, dans un manteau de dentelle, à ses paysages autoritaires, dramatiques et pleins, succèdent des œuvres où l’élément décoratif et symbolique tient une grande place. Si l’accent énergique de la manière Thang subsiste dans les beaux portraits de prêtres japonais datant de cette période, l’art (avec la civilisation tout entière) n’en a pas moins tendance à devenir précieux, dévot, féminin. Au Japon, le mysticisme introduit par Kô-bô-daisi eut une fortune extraordinaire sous les Foudziwara. Les sectes Tendaï, Singon (en chinois, Tchen-yen) et Djôdo (en chinois Tsing-thou), issues du même rameau, formèrent les âmes,