Aller au contenu

Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/79

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hastivement les luy apportent, et arment leur maistre : et par-dessus le vestent d’une casacque, sur laquelle estoit portraict un lyon barré : sa salade estoit couverte d’un grand pennache, et au plus haut estoit enlevé un petit vieillard, lequel avec le doigt monstroit ces vers qui estoient gravez sur icelle :

Rien ne court plustost que le temps,
Les heures ressemblent aux ans :
Si tost que voyons l’enfant naistre,
Aussi-tost se vieillist son estre.

Puis il monte tout armé sur un grand coursier, et prend une forte lance faite d’un chesne verd ; et, comme fasché en soy-mesme, donne des esperons à son cheval, et se presente au tournoy où les lances se brisoient à outrance. Il ne faut de donner la premiere œillade là où estoit Balduine : ce qui luy enflamba davantage sou feu amoureux, et afin qu’il luy peut plaire luy quadrupla sa force, la rendant pareille à celle de Samson, avec laquelle, n’ayant en main qu’une machoire d’asne, il renversa tant de milliers d’hommes. Il avance son cheval, et outrepasse de grand vistesse les barrieres, et s’arrestant un petit pour remarquer l’estour des combattans, soudain lasche les resnes, et tenant la lance ferme en l’arrest, faict voler le sablon en l’air, et, courant d’une course legiere, fait trembler tout le camp. Il fait monstrer au soleil les semelles du premier ; le second fut par luy desarçonné ; le troisiesme fut jetté au bas, donnant du cul en terre ; le quatriesme comme les autres fut renversé sur terre, le cinquiesme, portant envie aux autres, les accompagna de mesme ; le sixiesme, qui estoit de cheval, se veit incontinent homme de pied ; le septiesme estendit ses fesses sur le sablon ; le huictiesme s’apperceut incontinent estre desmonté ; le neufviesme fut contrainct ouvrir les genoux et quitter la selle ; le soleil se voulut cacher, quand le dixiesme, malgré luy, luy monstra le talon à