artistiques, la nudité doit prendre naturellement le sens que, sous nos latitudes, elle revêt dans la vie. C’est pour cela que le sens chrétien la proscrivait des demeures ordinaires, la bannissait des places publiques, et surtout en dérobait la vue aux yeux des adolescents. Le déshabillé a un sens plus net encore. Et les analyses subtiles des romanciers, tout l’art qu’ils déploient, qui leur voile les effets sociaux de leurs œuvres, sont tout simplement entendus par le public comme des raffinements qui relèvent de discrétion les scènes finales et, évitant les détails précis et grossiers, ne laissent que plus libre champ à l’imagination sensuelle. Les ressorts secrets par où l’on explique les passions leur servent d’excuse et la constatation des plaisirs éprouvés par les héros leur donne un attrait de plus. Peu importent même les souffrances, les dégoûts et les rancœurs, la description de la passion porte en elle-même quelque chose de contagieux. On sait l’épidémie de suicides que provoqua Werther, et nul ne saura le nombre de femmes qui ont eu la tête et les sens troublés par la Nouvelle Héloïse et par Valentine.
C’est précisément pour cela, beaucoup plus encore que pour la pornographie véritable de nos auteurs, que les romans français sont suspects à l’étranger. Les plus célèbres roulent presque tous sur l’inévitable adultère, et les plus consciencieux, comme les plus délicats,