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ŒUVRES DE FONTANES.

Hélas ! il eût charmé, sans la griffe sanglante,
 Tous les lieux d’alentour.

Des bocages voisins jusqu’aux cieux parvenue,
Sa voix de ses rivaux eût vaincu les concerts ;
Mais, presque à sa naissance, elle expire inconnue
 Dans le fond des déserts.

Cher frère ! ô mon ami, mon maître, mon modèle,
Ô de mes premiers ans le tendre compagnon !
Puisse un jour l’amitié, sur ma lyre fidèle,
 Éterniser ton nom !

Il n’est point d’autre honneur où je veuille prétendre,
C’est le vœu de l’amour et non pas de l’orgueil ;
Puisse, en secret du moins, ma voix se faire entendre
 Au fond de ton cercueil !

Encor quelques moments, et la mort nous rassemble !
Quand mes derniers soleils vont bientôt expirer,
Aux bords de la fontaine où nous chantions ensemble
 Il m’est doux de pleurer.

Niort.