Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
163
DE LA LITTÉRATURE.

fluence de la religion, des mœurs et des lois sur la littérature, et quelle est l’influence de la littérature sur la religion, les mœurs et les lois. Il me semble que l’on n’a point suffisamment analysé les causes morales et politiques qui modifient l’esprit de la littérature. »

La conception de ce plan est plus hardie que l’exécution n’en est facile. On ne pouvait le remplir qu’à l’aide de la méditation et du temps. Il fallait réunir à la connaissance approfondie de l’histoire, ce coup d’œil observateur qui ne se trompe jamais sur le résultat des faits et sur leurs causes. Dans un ouvrage où tous les hommes illustres et tous les siécles sont jugés, leurs maximes et leur autorité ne devaient être contredites qu’avec la plus grande circonspection ; et les préjugés de quelques cercles, les opinions de quelques jours, des goûts de fantaisie, des paradoxes dictés par des affections ou des répugnances particulières, ne pouvaient être sérieusement opposés à des traditions antiques et universelles, à cette science des âges qui, dans les lettres et les arts comme dans la morale, est encore le guide le plus infaillible de la raison, du goût et du génie.

En parcourant ce livre, on est surtout frappé du peu d’accord que madame de Staël a mis entre le système qu’elle veut établir, et les preuves dont elle veut l’appuyer. Ce système est la perfection successive et indéfinie de l’esprit humain ; et cependant elle se plaint à chaque page des progrès de la corruption universelle ! On l’entend même dénoncer plus d’une