quelques fragments, sur les missions des jésuites dans ce pays qu’ils gouvernèrent avec tant de gloire :
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« Arrivé à Buenos-Ayres, les missionnaires remontèrent Rio de la Plata, et, entrant dans les eaux du Paraguay, se dispersèrent dans ses bois sauvages. Les anciennes relations les représentent un bréviaire sous le bras gauche, une grande croix à la main droite, et sans autre provision que leur confiance en Dieu. Elles nous les peignent se faisant jour à travers les forêts, marchant dans les terres marécageuses où ils avaient de l’eau jusqu’à la ceinture, gravissant des roches escarpées, et furetant dans les autres et dans les précipices, au risque d’y trouver des serpents et des bêtes féroces, au lieu des hommes qu’ils y cherchaient.
« Plusieurs d’entre eux y moururent de faim et de fatigue ; d’autres furent massacrés et dévorés par les sauvages. Le père Lizardé fut trouvé percé de flèches sur un rocher : son corps était à demi-déchiré par les oiseaux de proie, et son bréviaire était ouvert auprès de lui à l’office des morts. Quand un missionnaire rencontrait ainsi les restes d’un de ses compagnons, il s’empressait de leur rendre les honneurs funèbres ; et, plein d’une grande joie, il chantait un Te Deum solitaire, sur le tombeau du martyr.
« De pareilles scènes, renouvelées à chaque instant, étonnaient les hordes barbares. Quelquefois, elles s’arrêtaient auprès du prêtre inconnu qui leur parlait de Dieu, et elles regardaient le ciel que l’apôtre leur montrait ; quelquefois, elles le fuyaient comme un enchanteur, et se sentaient saisies d’une frayeur étrange : le religieux les suivait en leur tendant les mains au nom de Jésus-Christ. S’il ne pouvait les arrêter, il plantait sa grande croix dans un lieu découvert, et s’allait cacher dans les bois. Les sauvages s’approchaient peu à peu pour examiner l’étendard de la paix, élevé dans la solitude ; un charme secret semblait les attirer à ce signe de leur salut. Alors le missionnaire, sortant tout à coup de son embuscade et profitant de la surprise des barbares, les invitait à quitter une vie misérable, pour jouir des douceurs de la société.
« Quand les jésuites se furent attache quelques Indiens, ils eurent recours à un autre moyen pour gagner des âmes.
« Ils avaient remarqué que les sauvages de ces bords étaient fort sensibles à la musique. On dit même que les eaux du Paraguay ren-