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Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/308

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DISCOURS.

La fête qui nous rassemble est donc, s’il m’est permis de le dire, celle de la renaissance de la société. Les lois civiles l’ont en effet raffermie sur ses fondements ; et c’est alors que le caractère national s’est hâté de reparaître. Lorsqu’un peuple, longtemps séduit par de faux guides, se rallie autour de la gloire, lorsqu’il recommence à honorer les grandes actions par des monuments durables, les sentiments du juste et du beau rentrent dans tous les cœurs, et l’ordre social est rétabli. Les statues qu’on érigé à ces hommes privilégiés qui sont faits pour conduire la foule, indiquent à tous les autres le chemin du véritable honneur. Autour de ces monuments dressés par la reconnaissance publique, on voit se manifester les affections les plus douces et les plus nobles du cœur humain. L’enthousiasme de la gloire et de la vertu se communique à toutes les âmes, élève toutes les pensées, agrandit tous les talents, et peut enfanter tous les prodiges. Tel est l’état de la société réparée.

Au contraire, quand le corps politique tombe en ruines, tout ce qui fut obscur attaque tout ce qui fut illustre. La bassesse et l’envie parcourent les places publiques en outrageant les images révérées qui les décorent. On persécute la gloire des grands hommes jusque dans le marbre et l’airain qui en reproduisent les traits. Leurs statues tombent, on ne respecte pas même leurs tombeaux. Le citoyen fidèle ose à peine dérober en secret quelques-uns de ces restes sacrés : il y cherche en pleurant l’ancienne gloire de la patrie, et leur demande pardon de tant d’ingratitude ;