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Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/328

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DISCOURS.

sont achetés. Combien de reconnaissance et d’admiration doit accompagner cette brave armée qui, dans les solitudes de la Pologne, combattit tous les besoins et tous les périls, et qui triompha des saisons comme des hommes ! Quel orateur pourra louer dignement cette garde impériale, dont chaque compagnie vaut un grand corps d’armée, et tous ces soldats enfin dont chacun mérite d’entrer dans cette garde invincible ! Quels honneurs décernerons-nous à ces lieutenants du chef suprême, à ces guerriers qui, dans toute autre armée, auraient le premier rang, et qui, dans celle-ci, sont plus contents et plus fiers d’occuper, à une longue distance, la seconde place ? Ce n’est point assez de vaincre pour ces invincibles légions, elles veulent encore, avec une magnanimité vraiment française, effacer jusqu’au souvenir des défaites de leurs ancêtres. Après avoir repris dans les arsenaux de l’Autriche l’armure de François Ier, captif à Pavie, elles transportent à Paris cette colonne injurieuse qui s’élevait dans les champs de Rosbach, et font ainsi du monument de nos revers un nouveau monument de nos triomphes.

Quelques-uns des braves vétérans qui m’écoutent ont peut-être vu cette fatale journée, où le talent des généraux n’a pas secondé la valeur des soldats. Ils se consoleront de leur défaite, en attachant l’épée de leur vainqueur aux voûtes de ce temple. Cette épée reposera sous leur garde à côté du tombeau de Turenne ; et quelquefois, la contemplant avec une joie mêlée de respect, ils se diront : « Si elle a vaincu les