Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome II, 1825.djvu/141

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coup de ses microscopes. Tout ce qui pouvait y être observé, l’était. Il fut le premier à qui se dévoila le spectacle du monde le plus imprévu pour les physiciens, même les plus hardis en conjectures ; ces petits animaux jusques-là invisibles, qui doivent se transformer en hommes, qui nagent en une quantité prodigieuse dans la liqueur destinée à les porter, qui ne sont que dans celle des mâles, qui ont la figure de grenouilles naissantes, de grosses têtes et de longues queues, et des mouvemens très vifs. Cette étrange nouveauté étonna l’observateur, il n’en osa rien dire. Il crut même que ce qu’il voyait pouvait être l’effet de quelque maladie, et il ne suivit point l’observation.

Vers la fin de 1674, en 1675 et 1676, son père l’envoya étudier en littérature, en grec, en philosophie, en anatomie, sous les plus habiles professeurs de Leyde et d’Amsterdam. Ses maîtres en philosophie étaient des cartésiens aussi entêtés de Descartes, que les scolastiques précédens l’avaient été d’Aristote. On n’avait fait dans ces écoles que changer d’esclavage. Hartsoëker devint cartésien à outrance, mais il s’en corrigea dans la suite. Il faut admirer toujours Descartes, et le suivre quelquefois.

Hartsoëker alla en 1677 de Leyde à Amsterdam, ayant dessein de passer en France pour y achever ses études. Il reprit les observations du microscope, interrompues depuis deux ans, et revit ces animaux qui lui avaient été suspects. Alors il eut la hardiesse de communiquer son observation à son maître de mathématiques, et à un autre ami. Ils s’en assurèrent tous trois ensemble. Ils virent de plus ces mêmes animaux sortis d’un chien, et de la même figure à peu près que les