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heureux que les princes daignent les admettre à leur faire la cour, les histoires n’oublient pas les visites rendues aux savans par les princes ; elles honorent les uns et les autres, et peut-être également.

Dans le même temps, le feu électeur Palatin, Jean-Guillaume, avait jeté les yeux sur Hartsoëker, pour se l’attacher : mais, ce qui est rare, le philosophe résistait aux sollicitations de l’électeur ; et, ce qui est plus rare encore, l’électeur persévéra pendant trois ans ; et enfin, en 1704, le philosophe se résolut à s’engager dans une cour. Il fut le premier mathématicien de S. A. E., et en même temps professeur honoraire en philosophie dans l’université d’Heidelberg.

Ce n’est pas assez pour un savant attaché à un prince, d’en recevoir régulièrement, et magnifiquement même, si l’on veut, ces récompenses indispensables que reçoivent sans distinction tous ses autres officiers : il lui en faut de plus délicates ; il faut que le prince ait du goût pour les talens et pour les connaissances du savant, il faut qu’il en fasse usage ; et plus cet usage est fréquent et éclairé en même temps, plus le savant est bien payé. Hartsoëker eut ce bonheur avec son maître, qui avait beaucoup d’inclination pour la physique, et s’y appliquait plus sérieusement qu’en prince.

Le physicien prétendait même être obligé au prince d’une observation singulière, qui le fit changer de sentiment sur une matière importante. L’électeur lui apprit la reproduction merveilleuse des jambes d’écrevisse[1]. Sur cela, Hartsoëker, qui ne put concevoir que

  1. Voyez l’Histoire de 1712, pag. 35 et suiv.