Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome II, 1825.djvu/82

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ont une liberté entière de se faire valoir ; mais il n’usait point de ses droits à cet égard ; on ne le voyait qu’aux heures des repas, et il n’y tenait point de discours inutiles. Enfin, je le répète, on ne sait rien du voyage d’Angleterre, dont il aurait dû, au moins à sa femme et à ses enfans, vanter ou excuser le succès. Tout était enseveli dans un profond silence, et il est presque étonnant que Mery ait été connu. Il n’a rien mis du sien dans sa réputation, que son mérite, et communément il s’en faut beaucoup que ce soit assez.

En 1700, M. de Harlay, premier président, le nomma premier chirurgien de l’Hôtel-Dieu. Il n’accepta cette place que quand il fut bien sûr qu’elle n’était pas incompatible avec celle de l’académie, et je lui ai ouï dire que les deux ensemble remplissaient toute son ambition ; aussi l’ont-elles uniquement occupé. Des malades, quelqu’imporLans qu’ils fussent, et quelqu’utiles qu’ils dussent être, n’ont jamais pu le faire sortir de chez lui. Tout au plus a-t-il traité quelques amis, mais en amis, et en leur faisant très peu de chose. Des étrangers qui souhaitaient passionnément qu’il leur fît des cours particuliers d’anatomie, n’ont pu le tenter par les promesses les plus magnifiques et les plus sûres. Il ne voulait point d’une augmentation de fortune qui lui eût coûté un temps destiné à de nouveaux progrès dans sa science.

Mais ce même temps, qu’il estimait plus que la richesse, il ne l’épargnait point à ses devoirs ; il conçut volontairement le dessein d’en donner à l’Hôtel-Dieu beaucoup plus qu’il ne lui en demandait, selon l’usage établi. Les jeunes chirurgiens qui venaient y apprendre leur métier, n’y prenaient des leçons qu’au gré du