Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/266

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ce temps-là plutôt qu’un autre avait-il été destiné à leur anéantissement ? Rien n’est plus aisé à expliquer, selon le système de la religion chrétienne. Dieu avait fait son peuple du peuple juif, et avait abandonné l’empire du reste de la terre aux démons jusqu’à l’arrivée de son Fils : mais alors il les dépouille du pouvoir qu’il leur avait laissé prendre, il veut que tout fléchisse sous Jésus-Christ, et que rien ne fasse obstacle à l’établissement de son royaume sur les nations. Il y a je ne sais quoi de si heureux dans cette pensée, que je ne m’étonne pas qu’elle ait eu beaucoup de cours ; c’est une de ces choses à la vérité desquelles on est bien aise d’aider, et qui persuadent, parce qu’on y est favorable.


CHAPITRE III

Troisième raison des anciens chrétiens. — Convenance de leur opinion avec la philosophie de Platon.

Jamais philosophie n’a été plus à la mode qu’y fut celle de Platon chez les chrétiens, pendant les premiers siècles de l’Église. Les païens se partageaient encore entre les différentes sectes de philosophies : mais la conformité que l’on trouva qu’avait le platonisme avec la religion mit dans cette seule secte presque tous les chrétiens savants. De là vient l’estime prodigieuse dont on s’entêta pour Platon ; on le regardait comme une espèce de prophète, qui avait deviné plusieurs points importants du christianisme, surtout la sainte Trinité, que l’on ne peut guère nier qui ne soit assez clairement contenue dans ses écrits. Aussi ne manqua-t-on pas de prendre ses ouvrages pour des commentaires de Écriture,