Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/267

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et de concevoir la nature du Verbe comme il l’avait conçue. Il se figurait Dieu tellement élevé au-dessus des créatures, qu’il ne croyait pas qu’elles pussent être sorties immédiatement de ses mains, et il mettait entre elles et lui ce Verbe, comme un degré par lequel l’action de Dieu pût passer jusqu’à elles. Les chrétiens prirent cette même idée de Jésus-Christ ; et c’est là peut-être la cause pourquoi jamais hérésie n’a été ni plus généralement embrassée, ni soutenue avec plus de chaleur que l’arianisme.

Ce platonisme donc, qui semblait faire honneur à la religion chrétienne, lorsqu’il lui était favorable, se trouva tout plein de démons ; et de là ils se répandirent aisément dans le système que les chrétiens imaginèrent sur les oracles.

Platon veut que les démons soient d’une nature moyenne entre celle des dieux et celle des hommes ; que ce soient des génies aériens destinés à faire tout le commerce des dieux et de nous ; que, quoiqu’ils soient proches de nous, nous ne les puissions voir ; qu’ils pénètrent dans toutes nos pensées, qu’ils aient de l’amour pour les bons et de la haine pour les méchants, et que ce soit en leur honneur qu’on a établi tant de cérémonies différentes.

Il ne paraît point par là que Platon reconnût de mauvais démons, auxquels on pût donner le soin des fourberies des oracles. Plutarque, dans le dialogue des oracles qui ont cessé, assure cependant qu’il en reconnaissait ; et, à l’égard des platoniciens, la chose est hors de doute. Eusèbe, dans sa Préparation évangélique, rapporte quantité de passages de Porphyre, où ce philosophe païen assure que les mauvais démons sont les