Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/268

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

auteurs des enchantements, des philtres et des maléfices ; qu’ils ne font que tromper nos yeux par des spectres et par des fantômes ; que le mensonge est essentiel à leur nature ; qu’ils excitent en nous la plupart de nos passions ; qu’ils ont l’ambition de vouloir passer pour des dieux ; que leurs corps aériens et spirituels se nourrissent de suffumigation, de sang répandu, et de la graisse des sacrifices ; qu’il n’y a qu’eux qui se mêlent de rendre des oracles, et à qui cette fonction, pleine de tromperie soit tombée en partage ; et enfin à la tête de cette troupe de mauvais démons, il met Hécate et Sérapis.

Jamblique, autre platonicien, en dit autant ; et comme la plupart de ces choses-là sont vraies, les chrétiens reçurent le tout avec joie, et y ajoutèrent même un peu du leur, selon Tertullien, dans son Apologétique : par exemple, que les démons dérobaient, dans les écrits des prophètes, quelque connaissance de l’avenir, et puis s’en faisaient honneur dans leurs oracles.

Ce système des chrétiens avait cela de commode, qu’il découvrait aux païens, par leurs propres principes, l’origine de leur faux culte, et la source de l’erreur où ils avaient toujours été. Ils étaient persuadés qu’il y avait quelque chose de surnaturel dans leurs oracles ; et les chrétiens qui avaient à disputer contre eux, ne songeaient point à leur ôter cette pensée. Les démons, dont on convenait de part et d’autre, servaient à expliquer tout ce surnaturel. On reconnaissait cette espèce de miracle ordinaire qui s’était fait dans la religion des païens : mais on leur en faisait perdre tout l’avantage par les auteurs auxquels on l’attribuait : et cette voie était bien plus courte et plus aisée que celle de contester