Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ordonna au chien, à son tour, d’aller lui dire qu’il entrât, ce qui fut exécuté aussitôt ! Voilà ce qui s’appelle, chez les Grecs, écrire l’histoire. Cédrénus vivait dans un siècle ignorant, où la licence d’écrire impunément des fables se joignait encore à l’inclination générale qui y porte les Grecs.

Mais quand Eusèbe, dans quelque ouvrage qui ne serait pas venu jusqu’à nous, aurait effectivement parlé de l’oracle d’Auguste, Eusèbe lui-même se trompait quelquefois, et on en a des preuves constantes. Les premiers défenseurs du christianisme, Justin, Tertullien, Théophile, Tatien, auraient-ils gardé le silence sur un oracle si favorable à la religion ? Étaient-ils assez peu zélés pour négliger cet avantage ? Mais ceux mêmes qui nous donnent cet oracle le gâtent en y ajoutant qu’Auguste, de retour à Rome, fit élever dans le Capitole un autel avec cette inscription : C’est ici l’autel du fils unique, ou aîné de Dieu. Où avait-il pris cette idée d’un fils unique de Dieu, dont l’oracle ne parle point ?

Enfin, ce qu’il y a de plus remarquable, c’est qu’Auguste, depuis le voyage qu’il fit en Grèce, dix-neuf ans avant la naissance de Jésus-Christ, n’y retourna jamais ; et même, lorsqu’il en revint, il n’était guère dans la disposition d’élever des autels à d’autres dieux qu’à lui : car il souffrit, non seulement que les villes d’Asie lui en élevassent et lui célébrassent des jeux sacrés, mais même qu’à Rome on consacrât un autel à la Fortune, qui était de retour, Fortunae: reduci, c’est-à-dire à lui-même, et que l’on mît le jour d’un retour si heureux entre les jours de fête.

Les oracles qu’Eusèbe rapporte de Porphyre paraissent