Aller au contenu

Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/303

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tout. Je vois bien que tous les oracles peuvent n’avoir été que des fourberies, mais je ne le veux pourtant pas croire. Pourquoi ? parce que je suis bien aise d’y faire entrer les démons. Voilà une assez pitoyable espèce de raisonnement. Ce serait autre chose si Eusèbe, dans les circonstances des temps où il s’est trouvé, n’avait osé dire ouvertement que les oracles ne fussent pas l’ouvrage des démons ; mais qu’en faisant semblant de le soutenir, il eût insinué le contraire avec le plus d’adresse qu’il eût pu.

C’est à nous à croire l’un ou l’autre, selon que nous estimerons plus ou moins Eusèbe. Pour moi, je crois voir clairement que, dans l’endroit dont il est question, il n’y a placé les démons que par manière d’acquit et par un respect forcé qu’il a eu pour l’opinion commune.

Un passage d’Origène, dans son livre septième contre Celse, prouve assez bien qu’il n’attribuait les oracles aux démons que pour s’accommoder au temps et à l’état où était alors cette grande dispute entre les chrétiens et les païens.

« Je pourrais, dit-il, me servir de l’autorité d’Aristote et des péripatéticiens pour rendre la Pythie fort suspecte ; je pourrais tirer des écrits d’Épicure et de ses sectateurs une infinité de choses qui décréditeraient les oracles et je ferais voir aisément que les Grecs eux-mêmes n’en faisaient pas trop de cas ; mais j’accorde que ce n’étaient point des fictions ni des impostures ; voyons si en ce cas-là même, à examiner la chose de près, il serait besoin que quelque dieu s’en fût mêlé et s’il ne serait pas plus raisonnable d’y faire présider de mauvais démons et des génies ennemis du genre humain. »

Il paraît assez que naturellement Origène eût cru