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qui poussaient jusqu’à ces minuties, presque inutiles, l’exactitude de leurs impostures, pouvaient rien négliger d’essentiel.


CHAPITRE XIII

Distinctions de jours et autres mystères des oracles.

Les prêtres n’oubliaient aucune sorte de précaution. Ils marquaient à leur gré de certains jours où il n’était point permis de consulter l’oracle. Cela avait un air mystérieux, ce qui est déjà beaucoup en pareilles matières ; mais la principale utilité qu’ils en retiraient, c’est qu’ils pouvaient vous renvoyer sur ce prétexte, s’ils avaient des raisons pour ne pas vouloir vous répondre, ou que, pendant ce temps de silence, ils prenaient leurs mesures et faisaient leurs préparatifs.

À l’occasion de ces prétendus jours malheureux, il fut rendu à Alexandre un des plus jolis oracles qui ait jamais été. Il était allé à Delphes pour consulter le dieu, et la prêtresse, qui prétendait qu’il n’était point alors permis de l’interroger, ne voulait point entrer dans le temple.

Alexandre, qui était brusque, la prit par le bras pour l’y mener de force, et elle s’écria :

— Ah ! mon fils, on ne peut te résister.

— Je n’en veux pas davantage, dit Alexandre, cet oracle me suffit.

Les prêtres avaient encore un secret pour gagner du temps, quand il leur plaisait. Avant que de consulter l’oracle, il fallait sacrifier ; et si les entrailles des victimes n’étaient pas heureuses, le dieu n’était pas encore en humeur de répondre. Et qui jugeait des entrailles des victimes ? Les prêtres. Le plus souvent même,