Aller au contenu

Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE II

Pourquoi les auteurs anciens se contredisent souvent sur le temps de la cessation des oracles.

D’où vient donc, dira-t-on, que Lucain, au cinquième livre de la Pharsale, parle en ces termes de l’oracle de Delphes ? « L’oracle de Delphes, qui a gardé le silence depuis que les grands ont redouté l’avenir et ont défendu aux dieux de parler, est le plus considérable de toutes les faveurs du ciel que notre siècle a perdues. »

Et peu après : « Appius, qui voulait savoir quelle serait la destinée de l’Italie, eut la hardiesse d’aller interroger cette caverne depuis si longtemps muette, et d’aller remuer ce trépied oisif depuis si longtemps. »

D’où vient que Juvénal dit, en un endroit : « puisque l’oracle ne parle plus à Delphes » ?

D’où vient enfin que, parmi les auteurs d’un même temps, on en trouve qui disent que l’oracle de Delphes ne parle plus, d’autres qui disent qu’il parle encore ? Et d’où vient que quelquefois un même auteur se contredit sur ce chapitre ?

C’est qu’assurément les oracles n’étaient plus dans leur ancienne vogue, et qu’aussi ils n’étaient pas encore tout à fait ruinés. Ainsi, par rapport à ce qu’ils avaient été autrefois, ils n’étaient plus rien ; et, en effet, ils ne laissaient pourtant pas d’être encore quelque chose.

Il y a plus : il arrivait qu’un oracle était ruiné pour un temps, et qu’ensuite il se relevait, car les oracles étaient sujets à diverses aventures. Il ne les faut pas