Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/368

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

écrit que les empereurs avaient renoncé à ce titre par l’égard qu’ils avaient eu pour les papes, qui, apparemment, en craignaient l’abus.

Il n’est pas si surprenant de voir passer dans le christianisme, pour quelque temps, ces restes du paganisme, que de voir ce qu’il y avait dans le paganisme de plus extravagant, de plus barbare et de plus opposé à la raison et à l’intérêt commun des hommes, être le dernier à finir ; je veux dire les victimes humaines. Cette religion était étrangement bigarrée ; elle avait des choses extrêmement gaies et d’autres très funestes. Ici les dames vont dans un temple accorder, par dévotion, leurs faveurs aux premiers venus, et là, par dévotion, on égorge des hommes sur un autel. Ces détestables sacrifices se trouvent dans toutes les nations. Les Grecs les pratiquaient aussi bien que les Scythes, mais non pas à la vérité aussi fréquemment ; et les Romains qui, dans un traité de paix, avaient exigé des Carthaginois qu’ils ne sacrifieraient plus leurs enfants à Saturne, selon la coutume qu’ils en avaient reçue des Phéniciens leurs ancêtres, les Romains eux-mêmes immolaient tous les ans un homme à Jupiter Latial. Eusèbe cite Porphyre, qui le rapporte comme une chose qui était encore en usage de son temps. Lactance et Prudence, l’un du commencement et l’autre de la fin du quatrième siècle, nous en sont garants aussi, chacun pour le temps où il vivait. Ces cérémonies pleines d’horreur ont duré autant que les oracles, où il n’y avait tout au plus que de la sottise et de la crédulité.