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Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome IV, 1825.djvu/244

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les Grecs le cèdent aux Latins. J’en excepte une espèce de poésie, sur laquelle les Latins n’ont rien à opposer aux Grecs, on voit bien que c’est la tragédie dont je parle. Selon mon goût particulier, Cicéron l’emporte sur Démosthène, Virgile sur Théocrite et sur Homère, Horace sur Pindare, Tite-Live sur tous les historiens grecs.

Dans le système que nous avons établi d’abord, cet ordre est fort naturel. Les Latins étaient des modernes à l’égard des Grecs; mais comme l’éloquence et la poésie sont assez bornées, il faut qu’il y ait un temps où elles soient portées à leur dernière perfection, et je tiens que pour l’éloquence et l’histoire, ce temps a été le siècle d’Auguste. Je n’imagine rien au-dessus de Cicéron et de Tite-Live; ce n’est pas qu’ils n’aient leurs défauts, mais je ne crois pas qu’on puisse avoir moins de défauts avec autant de grandes qualités, et l’on sait assez que c’est la seule manière dont on puisse dire que les hommes soient parfaits sur quelque chose.

La plus belle versification du monde est celle de Virgile; peut-être cependant n’eût-il pas été mauvais qu’il eût eu le loisir de la retoucher. Il y a de grands morceaux dans l’Énéide d’une beauté achevée, et que je ne crois pas qu’on surpasse jamais. Pour ce qui est de l’ordonnance du poème en général, de la manière d’amener les événements et d’y ménager des surprises agréables, de la noblesse des caractères, de la variété des incidents, je ne serai jamais fort étonné qu’on aille au delà de Virgile, et nos romans qui sont des poèmes en prose, nous en ont déjà bien fait voir la possibilité.

Mon dessein n’est pas d’entrer dans un plus grand