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PARACELSE.

Vous traitez de ridicules des mystères où vous n’avez su pénétrer, et qui en effet sont réservés aux grands hommes.

MOLIÈRE.

J’estime bien plus ceux qui ne comprennent point ces mystères-là, que ceux qui les comprennent ; mais malheureusement, la nature n’a pas fait tout le monde capable de n’y rien entendre.

PARACELSE.

Mais vous qui décidez avec tant d’autorité, quel métier avez-vous donc fait pendant votre vie ?

MOLIÈRE.

Un métier bien différent du vôtre. Vous avez étudié les vertus des génies, et moi, j’ai étudié les sottises des hommes.

PARACELSE.

Voilà une belle étude ! Ne sait-on pas bien que les hommes sont sujets à faire assez de sottises ?

MOLIÈRE.

On le sait en gros et confusément ; mais il en faut venir aux détails, et alors on est surpris de l’étendue de cette science.

PARACELSE.

Et à la fin, quel usage en faisiez-vous ?

MOLIÈRE.

J’assemblais dans un certain lieu le plus grand nombre de gens que je pouvais, et là je leur faisais voir qu’ils étaient tous des sots.

PARACELSE.

Il fallait de terribles discours pour leur persuader une pareille vérité.