Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/115

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année ; et enfin, grâce à toutes les peines que se donnent les savants, on sait dans Jupiter que notre Terre est au monde. Les curieux vont la voir au bout d’une lunette, et la vue à peine peut-elle encore l’attraper.

Si ce n’était, dit la Marquise, qu’il n’est point trop agréable de savoir qu’on ne nous peut découvrir de dedans Jupiter qu’avec des lunettes d’approche, je me représenterois avec plaisir ces lunettes de Jupiter dressées vers nous, comme les nôtres le sont vers lui, et cette curiosité mutuelle avec laquelle les planètes s’entre-considèrent et demandent l’une de l’autre : Quel monde est-ce là ? Quelles gens l’habitent ?

Cela ne va pas si vite que vous pensez, répliquai-je. Quand on verroit notre Terre de dedans Jupiter, quand on l’y connaîtrait, notre Terre ce n’est pas nous ; on n’a pas le moindre soupçon qu’elle puisse être habitée. Si quelqu’un vient à se l’imaginer, Dieu sait comme tout Jupiter se moque de lui. Peut-être même sommes-nous cause qu’on y a fait le procès à des philosophes qui ont voulu soutenir que nous étions. Cependant je croirois plus volontiers que les habitants de Jupiter sont assez occupés à faire des découvertes sur leur planète, pour ne songer point du tout à nous. Elle est si grande que s’ils naviguent, assurément leurs Christophes