Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/121

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que les deux mondes qui sont aux extrémités de ce grand tourbillon, soient opposés en toutes choses.

Ainsi, reprit-elle, on est bien sage dans Saturne, car vous m’avez dit que tout le monde étoit fou dans Mercure. Si on n’est pas bien sage dans Saturne, repris-je, du moins, selon toutes les apparences, on y est bien flegmatique. Ce sont gens qui ne savent ce que c’est que de rire, qui prennent toujours un jour pour répondre à la moindre question qu’on leur fait, et qui eussent trouvé Caton d’Utique trop badin et trop folâtre.

Il me vient une pensée, dit-elle. Tous les habitants de Mercure sont vifs, tous ceux de Saturne sont lents. Parmi nous les uns sont vifs, les autres lents ; cela ne viendrait-il point de ce que notre Terre étant justement au milieu des autres mondes, nous participons des extrémités ? Il n’y a point pour les hommes de caractère fixe et déterminé ; les uns sont faits comme les habitants de Mercure, les autres comme ceux de Saturne, et nous sommes un mélange de toutes les espèces qui se trouvent dans les autres planètes. J’aime assez cette idée, repris-je ; nous formons un assemblage si bizarre, qu’on pourroit croire que nous serions ramassés de plusieurs mondes différents ? A ce compte, il est assez commode d’être ici, on y voit tous les autres mondes en abrégé.