Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/133

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sensible ; et pour parler plus juste, vous n’avez jamais de nuit. Ils seroient bien étonnés, les gens de ces mondes-là, accoutumés comme ils sont à une clarté perpétuelle, si on leur disoit qu’il y a des malheureux qui ont de véritables nuits, qui tombent dans des ténèbres profondes, et qui, quand ils jouissent de la lumière, ne voient même qu’un seul Soleil. Ils nous regarderoient comme des êtres disgraciés de la nature, et notre condition les feroit frémir d’horreur.

Je ne vous demande pas, dit la Marquise, s’il y a des Lunes dans les mondes de la Voie de lait ; je vois bien qu’elles n’y seroient de nul usage aux planètes principales qui n’ont point de nuit, et qui d’ailleurs marchent dans des espaces trop étroits pour s’embarrasser de cet attirail de planètes subalternes. Mais savez-vous bien qu’à force de me multiplier les mondes si libéralement, vous me faites naître une véritable difficulté ? Les tourbillons dont nous voyons les Soleils touchent le tourbillon où nous sommes. Les tourbillons sont ronds, n’est-il pas vrai ? Et comment tant de boules en peuvent-elles toucher une seule ? Je veux m’imaginer cela, et je sens bien que je ne le puis.

Il y a beaucoup d’esprit, répondis-je, à avoir cette difficulté-là, et même à ne la pouvoir résoudre ; car elle est très