Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/42

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général, et se joue de la petite boule.

Il me semble, reprit-elle, qu’il est ridicule d’être sur quelque chose qui tourne, et de se tourmenter tant ; mais le malheur est qu’on n’est pas assuré qu’on tourne ; car enfin, à ne vous rien celer, toutes les précautions que vous prenez pour empêcher qu’on ne s’aperçoive du mouvement de la Terre, me sont suspectes. Est-il possible qu’il ne laissera pas quelque petite marque sensible à laquelle on le reconnoisse ?

Les mouvemens les plus naturels, répondis-je, et les plus ordinaires, sont ceux qui se font le moins sentir, cela est vrai jusque dans la morale. Le mouvement de l’amour propre nous est si naturel, que le plus souvent nous ne le sentons pas, et que nous croyons agir par d’autres principes. Ah ! vous moralisez, dit-elle, quand il est question de physique, cela s’appelle bâiller. Retirons-nous, aussi bien en voilà assez pour la première fois. Demain nous reviendrons ici, vous avec vos systêmes, et moi avec mon ignorance.

En retournant au château, je lui dis, pour épuiser la matière des systèmes, qu’il y en avoit un troisième inventé par Ticho-Brahé qui, voulant absolument que la Terre fût immobile, la plaçoit au centre du monde, et faisoit tourner au-