Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/89

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un monde habité. On a trouvé jusque dans des espèces de pierres très dures de petits vers sans nombre, qui y étoient logés de toutes parts dans des vides insensibles, et qui ne se nourrissoient que de la substance de ces pierres qu’ils rongeaient. Figurez-vous combien il y avoit de ces petits vers, et pendant combien d’années ils subsistoient de la grosseur d’un grain de sable ; et sur cet exemple, quand la lune ne seroit qu’un amas de rochers, je la ferois plutôt ronger par ses habitants, que de n’y en pas mettre. Enfin tout est vivant, tout est animé ; mettez toutes ces espèces d’animaux nouvellement découvertes, et même toutes celles que l’on conçoit aisément qui sont encore à découvrir, avec celles que l’on a toujours vues, vous trouverez assurément que la terre est bien peuplée, et que la nature y a si libéralement répandu les animaux, qu’elle ne s’est pas mise en peine que l’on en vît seulement la moitié. Croirez-vous qu’après qu’elle a poussé ici sa fécondité jusqu’à l’excès, elle a été pour toutes les autres planètes d’une stérilité à n’y rien produire de vivant ?

Ma raison est assez bien convaincue, dit la Marquise, mais mon imagination est accablée de la multitude infinie des habitants de toutes ces planètes, et embarrassée de la diversité qu’il faut établir entre eux ; car je vois bien que la nature, selon