si nettement développés, que les prophètes de l’Ancien et du Nouveau Testament n’y auraient rien entendu auprès de ces auteurs juifs et païens. De quelque côté qu’on se puisse tourner pour sauver ces livres, on trouvera toujours, dans ce trop de clarté, une difficulté insurmontable. Si quelques chrétiens étaient bien capables de supposer des livres aux païens ou aux juifs, les hérétiques ne faisaient point de façon d’en supposer aux orthodoxes. Ce n’étaient que faux évangiles, fausses épîtres d’apôtres, fausses histoires de leurs vies ; et ce ne peut être que par un effet de la providence divine que la vérité s’est démêlée de tant d’ouvrages apocryphes qui l’étouffaient.
Quelques grands hommes de l’Église ont été quelquefois trompés, soit aux suppositions des hérétiques contre les orthodoxes, soit à celles des chrétiens contre les païens ou les juifs, mais plus souvent à ces dernières. Ils n’ont pas toujours examiné d’assez près ce qui leur semblait favorable à la religion ; l’ardeur avec laquelle ils combattaient pour une si bonne cause ne leur laissait pas toujours la liberté de choisir assez bien leurs armes. C’est ainsi qu’il leur arrive quelquefois de se servir des livres des sibylles, ou de ceux d’Hermès Trismégiste, roi d’Égypte.
On ne prétend point par là affaiblir l’autorité, ni attaquer le mérite de ces grands hommes. Après qu’on aura remarqué toutes les méprises où ils peuvent être tombés sur un certain nombre de faits, il leur restera une infinité de raisonnements solides, et de belles découvertes, sur quoi on ne les peut assez admirer. Si avec les vrais titres de notre religion ils nous en ont laissé d’autres qui peuvent être suspects, c’est à nous à ne recevoir d’eux que ce qui est légitime, et à pardonner à leur zèle de nous avoir fourni plus de titres qu’il ne nous en faut.