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les mystères de montréal

laissé bien que je sus qu’elle m’avait oublié… Souvent au milieu des brillantes fêtes du bord, j’ai pu paraître joyeux, cependant je souffre continuellement…

Le petit homme s’arrêta comme affecté par un souvenir lointain.

— Eh bien, Jos, continua-t-il après un instant de silence, la personne que j’ai tant aimée, à qui je pense sans cesse est aujourd’hui sur le Marie-Céleste… Ce navire est dans le port de Montréal prêt à lever l’ancre demain pour l’Italie… Fille ou femme il me la faut !

En même temps le petit homme donna du poing sur le chiffonnier puis continua :

— Tu n’es pas connu du capitaine du Marie-Céleste.

— Pas plus que du gouverneur du Canada.

— Nous enlèverons cette femme… Pendant que je me rendrai appareiller pour guetter le Marie-Céleste en mer, toi tu t’engageras sur ce navire.

— M’embarquer sur le Marie-Céleste !

— Oui, comme matelot. Tu vas mettre de vieux habits. On te prendra pour un pauvre diable… Tu demanderas à être engagé pour la traversée ; tu parles espagnol, tu diras que tu veux aller retrouver tes parents en Espagne et que tu n’as pas d’argent… Enfin tu peux en inventer beaucoup…

— Mais, Buscapié, on va se douter de quelque chose.

— On ne se doutera de rien, si tu agis comme toujours, avec habilité, avec audace. C’est la manière la plus simple d’écarter la police qui est sur ta piste.