Page:Fortier - Les mystères de Montréal, 1893.djvu/299

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
299
les mystères de montréal

Chacun donna son goût. De Courval demanda des cigares et il continua à parler, avec Braun surtout.

— Ce marin, fit-il, dont vous parliez tantôt devait être âgé à l’époque de sa disparition ; pourquoi votre belle-sœur ne l’avait-elle pas épousé avant ce jour ?

— Bah ! deux fois elle avait été sur le point de l’épouser.

— Mais enfin qui l’empêchait !

— La première fois le fiancé a été obligé de mettre la frontière entre lui et la police canadienne.

— Et la seconde ?

— La même chose.

— Il avait fait une coche !

— Un délit politique… Vous savez, il était à la tête des patriotes en 1837-38. Il se battait comme un brave et aurait gagné sa cause, à ce qu’on dit, si un de ses covillageois — un rival en amour — n’avait eu l’indélicatesse de lui tendre une embûche où plusieurs des siens ont rencontré la mort… Aussi Jeanne en veut bien à ce traitre.

— Comment se nommait-il ce traître ? demanda le banquier pâle comme du marbre.

— Son nom ?

— Oui, oui.

— Ah, Jeanne l’a prononcé bien souvent en le maudissant comme la cause des maux qui ont frappé sa famille et elle en particulier… Attendez donc, c’est quelque chose comme Turgeon… Gendron… Gagnon, Gagnon, c’est cela.