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Page:Fortier - Les mystères de Montréal, 1893.djvu/41

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les mystères de montréal

Dans cette partie du pays, si vous arrivez dans une maison après sept heures pour veiller, vous serez chanceux, si par une piquante allusion, on ne vous traite pas de loup-garou.

Un cotillon se danse à n’importe quelle heure et dans l’après-midi il y a autant de charme dans le jeu Recule toi de la qu’il y en a le soir.

Paul Turcotte arriva donc à bonne heure chez le notaire.

Jeanne le vit venir et alla lui ouvrir la porte elle-même. Ce soir il ne venait pas comme patriote mais comme cavalier ; elle le comprit et le fit entrer au salon.

— Je te félicite qu’on ne soit pas venu m’annoncer ta mort, comme ton patriotisme me le faisait craindre, dit la jeune fille après lui avoir souhaité le bonjour.

— Dieu merci, répondit le patriote, aucune balle lancée hier par les Habits-Rouges ne m’était destinée. Pourtant quel danger nous avons couru tous ensemble !

Les deux amoureux passèrent la soirée dans un tête-à-tête charmant. Sans doute qu’ils avancèrent beaucoup leurs amours, car avant de prendre son chapeau pour retourner chez lui le patriote demanda à Jeanne Duval :

— Pourquoi ne pas nous jurer ce soir un amour éternel ? Nous traversons une période dangereuse pour les Canadiens-français. Qui sait s’ils ne sont pas appelés à jouer le rôle des Acadiens d’autrefois ?… Nous avons des Lawrence et des Moncton à la tête du pays.