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le pouce crochu

ner la chasse. Il savait qu’ils ne reviendraient pas à la charge et il voyait que leur victime avait grand besoin qu’il la secourût. Il vint à elle, et il lui tendit la main pour l’aider à se remettre sur pied.

— Eh bien ! mon garçon, lui dit-il, nous n’avons rien de cassé, à ce qu’il me paraît. C’est égal, il était temps que je vinsse à votre secours, et j’ai eu une heureuse idée quand j’ai pris ce chemin pour rentrer dans Paris. Mais aussi, que diable cherchez-vous par ici à des heures pareilles ? Si vous y êtes venu pour dépenser votre paye dans les cabarets, vous avez fait un mauvais calcul, car ces drôles ont dû vous prendre votre argent et je m’étonne qu’ils ne vous aient pas assassiné par-dessus le marché. Vous avez eu peur, hein ? Remettez-vous… et appuyez-vous sur moi… vous ne tenez pas debout.

— Oh ! monsieur, murmura Camille, vous m’avez sauvé la vie.

Et elle se dégagea doucement du bras de son défenseur, qui la soutenait pour l’aider à reprendre son aplomb.

Le timbre féminin de la voix qui le remerciait l’étonna sans doute, car il recula de deux pas et il se mit à dévisager cet apprenti qui parlait comme une demoiselle.

Il ne tarda guère à remarquer les longues tresses qui pendaient sur la blouse et il s’empressa de changer de langage.

— Excusez-moi, madame, dit-il ; je ne pouvais pas deviner que sous ce costume d’ouvrier…

— Il y avait une jeune fille, acheva mademoiselle Monistrol. Je vous expliquerai pourquoi je me suis déguisée ainsi… mais avant tout, je vous en supplie, monsieur, aidez-moi à secourir mes amis…

— Vos amis ? vous n’étiez donc pas seule ?