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le pouce crochu

Courapied subissait déjà l’ascendant de Georget. Il s’étendit sur sa couche comestible et il ne tarda guère à fermer les yeux.

L’enfant serra précieusement dans la lanterne, pour les mettre à l’abri de l’humidité, les huit allumettes qui lui restaient, souffla sa bougie unique, referma la porte du falot, le plaça près du lit qu’il s’était arrangé, et se laissa aller au sommeil de l’innocence.

Ce sommeil fut très long, et cependant Georget se réveilla avant son père.

Il sentait des tiraillements d’estomac causés par la faim ; mais il ne voulut point déjeuner seul, et il attendit que Courapied donnât signe de vie.

Il s’assit sur son séant et il prêta l’oreille, dans l’espoir d’entendre quelques bruits du dehors. Mais rien ne troubla le silence profond du souterrain, pas même ce frémissement qu’imprime aux maisons de Paris le roulement des voitures dans les rues. Et ce n’était pas surprenant, car la route de la Révolte, qui passe à quelques centaines de mètres des ruines, est infiniment moins fréquentée que les boulevards.

— Si la demoiselle nous abandonne, pensa Georget, personne ne viendra nous chercher ici, à moins que les fraudeurs…

Tout à coup, il lui sembla qu’un objet très lourd venait de heurter extérieurement la muraille du fond.

Ce fut plutôt un ébranlement qu’un bruit distinct, et Georget se demanda s’il n’était pas dupe d’une illusion d’acoustique. Le mur, solidement construit, ne devait pas résonner comme un tambour au premier choc des baguettes.

L’enfant se leva pourtant, se traîna à quatre pattes