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le pouce crochu

Et comme le valet de chambre hésitait à répondre.

— Où ai-je la tête ? reprit le bel Alfred. Il n’y a que les femmes laides qui sortent si matin.

Flanque-la à la porte !

— J’ai essayé, monsieur le baron. Elle ne veut pas s’en aller.

— C’est un peu fort. Demande-lui son nom.

— Elle dit qu’elle s’appelle Olga.

— Olga !… tiens ! au fait !… je me rappelle que je l’ai convoquée pour ce matin… si j’avais pu prévoir qu’elle viendrait dès l’aurore, j’y aurais regardé à deux fois avant de l’appeler ici… Où l’as-tu mise ?

— Dans le fumoir, monsieur le baron.

— Eh bien, va lui dire qu’elle m’attende.

Jean disparut, et Fresnay, tout grommelant, se décida à se lever. Il passa un veston et un pantalon à pied, chaussa des pantoufles, alluma un cigare pour s’éclaircir les idées et se traîna jusqu’au fumoir, qui n’était pas loin de la chambre à coucher.

— Te voilà, toi ! dit-il à la soubrette qui s’était habillée avec une robe de la comtesse. Tu as donc été cantinière que tu te lèves au petit jour, comme si tu avais à servir la goutte aux troupiers ?

— Je sais bien que je vous dérange, dit Olga, mais…

— Bon ! tu tiens à ne pas perdre les dix louis que je t’ai promis. Tu les auras. Commence par les gagner. Qu’as-tu à me raconter ?

— Ça dépend de ce que vous voulez savoir.

— D’abord, hier, quand je suis arrivé chez la baronne, l’amant était là, pas vrai ?

— Oui… au second… dans le cabinet de toilette… et il ne tenait qu’à vous de le pincer.