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— Il pensa : C’est quand il y a naissance qu’il y a vieillesse et mort : vieillesse et mort ont pour occasion la naissance.

Il va en effet de soi que pour vieillir et mourir il faut commencer par naître : « On ne peut abattre un arbre avant qu’il n’ait crû. » La naissance est directement représentée par une scène d’accouchement.

3o En présence de quoi y a-t-il naissance ? À quelle occasion y a-t-il naissance ? — C’est quand il y a venue à l’existence qu’il y a naissance ; la naissance a pour occasion la venue à l’existence.

Bhava en langage bouddhique ne signifie pas « existence » mais « devenir, production », ici même « reproduction ». Pour qu’un enfant soit mis au monde, il faut d’abord qu’il ait été conçu. Toute naissance suppose au préalable conception et, par suite, gestation ; c’est pourquoi la venue à l’existence est figurée par une femme visiblement enceinte.

4o En présence de quoi y a-t-il venue à l’existence ? À quelle occasion y a-t-il venue à l’existence ? — C’est quand il y a prise de possession qu’il y a venue à l’existence ; la venue à l’existence a pour occasion la prise de possession.

Il ne peut y avoir de conception qu’à la suite d’un accouplement et c’est bien d’une possession de ce genre qu’il s’agit ici ; mais la pudeur monastique a fait que l’union des sexes est symbolisée, tout comme dans le début de la Genèse, par l’acte de cueillir les fruits d’un arbre.

5o En présence de quoi y a-t-il prise de possession ? À quelle occasion y a-t-il prise de possession ? — C’est quand il y a désir qu’il y a prise de possession ; la prise de possession a pour occasion le désir.

Pour employer le langage de nos catéchismes il ne peut y avoir « d’œuvre de chair » s’il n’y a pas eu auparavant désir charnel, et trishnâ désigne bien ici la concupiscence sensuelle ; mais comme le mot signifie proprement « soif », il est figuré par un homme buvant, parfois aussi attirant à lui la femme demi-nue qui lui sert à boire.

6o En présence de quoi y a-t-il désir ? À quelle occasion y a-t-il désir ? — C’est quand il y a sensation qu’il y a désir ; le désir a pour occasion la sensation.

Pour que le désir s’éveille il faut une raison, et cette raison ne peut être qu’une sensation ou perception (les deux notions ne sont pas encore distinguées), et, comme la vue est de beaucoup le plus représentatif de nos sens, vêdanâ s’entend avant tout d’une perception visuelle. On ne peut éprouver de désirs que pour une femme que l’on a vue, et c’est pourquoi la sensation ou perception est symbolisée par une flèche qui vient taper droit dans l’œil.

7o En présence de quoi y a-t-il sensation ? À quelle occasion y a-t-il sensation ? — C’est quand il y a contact qu’il y a sensation ; la sensation a pour occasion le contact.

La sensation ou perception ne peut à son tour se produire que s’il y a contact entre les sens et leurs objets. Dans les idées indiennes ce sont d’ailleurs les sens qui vont saisir au dehors les objets extérieurs, puis en réfèrent à l’esprit. Les artistes prennent d’ordinaire sur eux de figurer le contact par un couple humain, assis ou debout, et se tenant étroitement