Je fends de tous côtés, bras, jambes, cuisses, têtes :
Mes grands coups se font craindre ainsi que des tempêtes :
J'attire sur moi seul mille traits opposés :
Mais d'un de mes regards j'abas les plus osés :
Enfin je fis alors, ce qu'à peine on peut croire, [815]
De deux camps ennemis une seule victoire.
Cet exploit gigantesque est certes merveilleux.
Comment décririez-vous ce combat périlleux ?
Au secours Polymnie, Érato, Terpsichore.
Fuyons, cette fureur le va reprendre encore. [820]
Demeurez, grand guerrier, ignorez-vous les noms
Des Muses qu'il invoque ?
Il parle à ses démons,
Son œil n'est plus si doux, il fait mille grimaces,
Et mâche entre ses dents de certaines menaces,
Voyez comme il nous lance un regard de travers ? [825]
C'est de cette façon que l'on fait de bons vers.
Faut-il être en fureur ? Ce métier est étrange.
J'aime mieux pour ce coup me passer de louange,
Pour voir faire des vers je n'y prends pas plaisir.
J'en ferai donc pour vous avec plus de loisir. [830]
Je vous veux présenter des enfants de ma Muse.
Je vous ferai faveur.
Mais à quoi le m'amuse.
Cherchons, mes yeux, cherchons ces aimables appas.
Où courez-vous, ami, ne m'abandonnez pas.
Ne craignez rien de lui, croyez en ma parole. [835]
Adieu donc, pauvre amant, que le ciel vous console.