Le courroux d'un savant est des plus dangereux.
Je ne veux point tenter d'être si malheureux.
Aussi d'autre côté pourrai-je avec rudesse [1685]
Te chasser de chez moi, vénérable Richesse ?
Nourrice des humains ? Cher et puissant secours ?
J'aurais bien mérité le reste de mes jours
De voir devant mes pieds, pour éternel supplice,
De la nécessité le triste précipice. [1690]
Puis manquant de promesse à cet homme puissant,
Il peut par sa richesse opprimer l'innocent :
Contre un riche ennemi l'on a peu de défense.
Il pourrait méditer quelque indigne vengeance ;
M'imputer quelque crime, aposter des témoins, [1695]
Me priver et de biens, et d'honneur pour le moins ;
Et n'étant pas de mort la sentence suivie,
Payer des assassins pour me priver de vie.
Dieux ! Je n'ai pas encore si peu de jugement
Que manquer de respect pour un si riche amant. [1700]
Mais oserais-je aussi mépriser la Vaillance,
Qui donne tout à l'humble, et punit qui l'offense ?
S'il savait seulement que j'eusse osé douter
Pour l'accepter pour gendre, ou pour le rebuter ;
Un seul de ses regards, ainsi qu'un trait de foudre, [1705]
Serait assez puissant pour me réduire en poudre.
Sans doute il pourrait bien, avec quelque raison.
Sur ce cruel mépris saccager ma maison.
À quoi suis-je réduit ? Quel conseil dois-je prendre ?
Tout me plaît et me nuit : mais j'aperçois Lysandre. [1710]
Scène II
De votre gaieté le sujet est-il grand ?
Je viens d'accommoder un plaisant différend.
J'ai vu de toutes parts une troupe accourue
Au bruit d'une querelle en la prochaine rue,
C'était d'un grand Poète avec un grand Guerrier. [1715]
Le Guerrier fuyait l'autre en l'appelant Sorcier