Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome I, 1922.djvu/33

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MON ENCRIER.

— Ne trouvez-vous pas, Monsieur, ce rosbif très bon ?

— Oh ! très bon, Madame.

Et j’essayai de lui parler musique. Elle m’a déclaré alors :

I don’t know.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

— Ce pudding me paraît exquis ; ne vous semble-t-il pas de même ? m’a-t-elle dit au dessert.

— En effet. Madame ! Ce cuisinier français est vraiment très fort.

Et je lui dis, à ce propos, quelques mots de la France. Mais, cette fois, elle ne me répondit seulement pas.

Même jour.

J’ai vu, ce matin, l’océan pour la première fois.

Jamais, avant cet instant, je n’avais pu me figurer parfaitement l’étendue démesurée de l’ineptie humaine. Maintenant, je comprends. L’infini des flots m’explique l’infini de la Bêtise.

Mais non, mais c’est en vain… Tes horizons, ô ciel marin, n’enfermeront jamais les perspectives de démence, les panoramas de délire, que nous découvrent les gazettes. Tes flots n’ont pas d’immensités que ne dépassent et ne confondent les audaces des journalistes et des politiciens. Tes replis ne cachent pas de végétations plus insensées que les raisonnements d’un