Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome I, 1922.djvu/98

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.
83
NOTRE DÉPUTATION

raître exagérés et violents. Je ne les ai écrits cependant qu’après mûre réflexion. J’affirme qu’ils ne vont pas au-delà de la vérité. Ils expriment un fait que tous ceux qui ont jamais passé quelque temps dans la capitale ont pu constater par eux-mêmes.

J’ai vécu à Ottawa assez longtemps. J’ai été journaliste. J’ai pu voir de mes yeux ce qui se passait là. Eh bien ! je vous déclare une fois de plus (en m’excusant d’avoir à le répéter) que le groupe ministériel canadien-français se compose, pour la très forte majorité, de bonshommes tellement bornés, ou inconscients, que les trois quarts d’entre eux — au moins les trois quarts n’hésitent pas à voter en retour d’une « passe », d’une boîte de cigares ou d’un verre de champagne, des bills d’intérêt privé qu’ils n’ont seulement jamais lus[1].

On les verra s’informer gravement, auprès d’un whip quelconque, à la fin d’un débat où ils sont les premiers intéressés, s’il est vrai qu’il faille voter de tel côté.

Monsieur, s’écrie, dans je ne sais plus

  1. Je ne dis pas que sans le champagne ni les cigares ils ne voteraient pas ces bills. Il est au contraire infiniment probable qu’ils les voteraient quand même. Du reste, je l’ai déjà dit, on ne prend même pas la peine de les acheter.

    Quand je rappelle qu’ils acceptent de petits cadeaux, je n’entends pas trouver dans ce fait une preuve de vénalité ; j’y vois seulement un manque de dignité sans nom, — et surtout de l’inconscience.

    J’ai nommé plus haut trois députés, en particulier. Il n’est pas à ma connaissance personnelle que ceux-là aient jamais rien reçu des schemers ; et je ne voudrais pas le laisser entendre, attendu que je n’en sais rien…