Et d’abord, vous affirmez l’existence d’une littérature canadienne-française. Quelle preuve en donnez-vous ? Que Gaspé, Garneau, Crémazie et Buies ont laissé des pages de mérite, et que nous avons encore aujourd’hui des gens de talent.
Je n’ai jamais prétendu autre chose de ma vie, Monsieur. J’ai seulement dit qu’une douzaine de bons ouvrages de troisième ordre ne font pas plus une littérature qu’une hirondelle ne fait le printemps. Et si cela ne vous paraît pas évident, si vous persistez à croire que cela peut se discuter, je suis bien forcé de conclure que vous voulez à toutes forces vous moquer de nous.
J’ai encore écrit que rien, présentement, ne saurait faire présager la naissance prochaine d’une littérature à nous. Me suis-je trompé davantage sur ce point ? Cela supposerait la disparition au moins partielle des deux causes qui nous ont paralysés jusqu’ici et qui sont malheureusement aujourd’hui ce qu’elles étaient hier. Vous me répondez que ni l’une ni l’autre de ces causes n’a l’importance que je lui attribue ; la situation matérielle des littérateurs ne vous semble guère plus défavorable au Canada qu’en France, et vous jugez peu fondées mes plaintes au sujet de la critique, dont vous contestez l’influence heureuse sur le progrès des lettres.
« Les écrivains français ne sont pas tous des nababs. » Sans doute, Monsieur, mais vous