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— Est-ce aussi, demandai-je, le règlement qui vous commande toutes les autres petites vexations auxquelles vous me soumettez : livres égarés pendant deux ou trois jours en vos tiroirs, — comme par hasard ; visiteurs renvoyés sans même un prétexte… et le reste ?

« Est-ce le règlement qui vous obligeait à me faire fouiller et refouiller des pieds à la tête, à mon arrivée, lorsque déjà vous aviez donné l’ordre de me dépouiller entièrement de mes habits ?

« Enfin et surtout, gouverneur, est-ce le règlement qui vous obligeait à me fixer, sur les vingt-deux cellules libres du 17, précisément la voisine de celle dont cet honorable Italien a fait à la fois sa bauge et son charnier ? »

. . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . .

M. Morin, tout d’abord, ne répondit pas. Il cessa seulement, pour une minute, de fumer sa bonne pipe, et, levant tout à coup la tête, souffla longuement vers le plafond, à la manière des cachalots de sa rive natale…

Puis il me dit :

— Je n’ai point le temps de discuter tout ça… Mais j’ai fait ce qui doit être fait. Moi, je ne connais qu’une chose : c’est le règlement. Le règlement, tout est là !

Ce règlement, ce fameux règlement dont M. Morin avait toujours plein la bouche, il n’y avait guère de monde, à la prison, qui le connût. Et je crois même que le prestige dont il jouissait lui venait, pour beaucoup, précisément de cette ignorance. Pourtant, on le trouvait affiché très en vue dans le grand vestibule de l’entrée, à la chapelle, dans les corridors, et même, je crois, dans le bureau du gouverneur.

Un jour, j’eus la curiosité d’y jeter un coup d’œil. Voici ce que j’y lus tout d’abord :

DES PRISONNIERS


La classification des prisonniers sera basée sur les distinctions suivantes :

I. — Adultes attendant leur procès pour la première offense (sic).

II. — Enfants de moins de seize